L’Huitre et les Plaideurs, par Despréaux
La Fontaine et Despréaux ont également traité ce sujet. La fable de Despréaux date de 1669, et celle de La Fontaine de 1671 ; mais celle de La Fontaine, quoique composée la dernière, a été publiée la première. Elle a paru en 1671, avec sept autres fables ; plusieurs années, par conséquent, avant de figurer au second recueil de fables, qui fut publié en 1678. La fable de Despréaux n’a paru qu’en 1672, avec l’épître deuxième, dédiée à l’abbé des Roches (1). Elle a été écrite en même temps que l’épître première, dans laquelle elle devait figurer comme épisode.
Un jour, dit un autour, n’importe en quoi chapitre,
Deux voyageurs à jeun, rencontrèrent une huître ;
Tous deux la contestaient, lorsque dans leur chemin,
La Justice passa, la balance à la main.
Devant elle, à grand bruit, ils expliquent, la chose.
Tous deux avec dépens veulent gagner leur cause.
La Justice, pesant ce droit litigieux,
Demande l’huître, l’ouvre et l’avale à leurs veux,
Et par ce bel arrêt terminant la bataille :
Tenez, voilà, dit-elle, à chacun une écaille.
Des sottises d’autrui nous vivons au Palais ;
Messieurs, l’huître était bonne, adieu ! Vivez en paix.
(1) Boileau a toujours soutenu que sa fable était la première en date. Cependant, on lit dans la fable des frelons et des mouches à miel, parue en 1668, dans le livre I, fable21 :
…. on nous mange,on nous gruge,
on nous ruine par des longueurs,
on fait tant, à la fin, que l’huître est pour le juge,
les écailles pour les plaideurs.
Nos deux auteurs
- Extraits du “La Fontaine et Boileau sur le terrain de la fable” par Edmond Cuvelier. 1906.