Vaine de ses nombreux printemps,
Et relevant sa tête altière,
L’immortelle raillait des épis jaunissants
Qui près d’elle tombaient sous la faux meurtrière :
Je vous ai vus naître en ces champs,
Et vous mourez, et je vis, disait-elle,
Et ce jour n’aura pas pour vous de lendemain ;
Mais pour moi, la fleur immortelle,
Le printemps de retour me retrouve nouvelle,
Et le jour est bien loin qui verra mon déclin.
Un épi répondit : Ne soyez point si vaine
D’échapper toujours au trépas ;
Car si vous en valiez la peine,
On ne vous épargnerait pas.
D’un amas de printemps stérile
Cessez de tirer vanité.
Quand la mort est féconde et la vie inutile,
Mieux vaut la mort que l’immortalité.
« L’Immortelle et les Epis »