Damon vivait à la campagne ,
Loin du tumulte, et possédait
Un domaine modeste, une aimable compagne ;
Il se croyait heureux ; je conclus qu’il l’était.
Certain jour son ami Durville
Fut chez lui ; dès long-temps Damon ne l’avait vu ;
Mais un ami d’enfance est toujours bien reçu.
On parla de la cour, on parla de la ville,
Puis du collège, et cœtera.
A propos, dit Damon, midi sonne, et sans doute
Que notre ami Durville avec nous dînera?
— Impossible! — Comment! — Je me remets en route.
— On va servir. — Non, non , adieu; je prends congé.
— Quoi ! mon cher condisciple ! — Oh ! je suis engagé.
— Qui donc t’a retenu ? — Le ministre Cordière.
— C’est un sot. — Je le sais ; mais, mon ami, quel vin !
D’ailleurs son cuisinier est un homme divin.
Sache que dans la France entière
Il n’a pas son pareil. D’autre part, Monseigneur
Auprès du souverain est en grande faveur;
Et je veux obtenir… — Oh! mon ami Durville, >
Tu rampes ! — Non, je suis complaisant.—Dis, flatteur ;
Eh bien ! rampe comme un reptile,
Et pour de tels faquins néglige tes amis !
Tu sièges à la chambre, où tu vends ton pays ;
Pourquoi? pour assouvir l’orgueil, l’intempérance.
Ta conduite m’afflige et ne me surprend pas.
Peut-on avec des goûts, des sentiments si bas ,
Conserver son indépendance!
“L’Indépendance”