Planter le mouchon; la veillée du mouchon.
Plusieurs familles du Mont-Jura, pour ne pas courir le risque de laisser leurs biens à des moines, avant de marier leurs enfants, s’assuraient d’un héritier. C’est ce qu’ils appelaient la veillée du mouchon. Avait-on un garçon en âge d’être marié, on cherchait une fille nubile. On mettait ensemble les deux amants, après avoir pourvu à leur nourriture. Les père et mère fichaient dans la cheminée une branche de sapin, et se retiraient après l’avoir allumée, on appelait cela planter le mouchon. Les deux amants, restés seuls, procédaient au grand œuvre, et ils avaient droit de s’ébattre à ce jeu jusqu’à ce que le bois résineux fiché dans la cheminée fût consumé et cessât de fumer. Si la fille éprouvait ensuite les résultats ordinaires de cet exercice, les parents, assurés d’un héritier, mariaient les deux amants. Ces essais ne réussissaient pas toujours, et il arrivait qu’un garçon, avant son mariage, répétait cette épreuve avec différentes filles du canton, tant on craignait de laisser son héritage à des étrangers. Cet usage de planter le mouchon était sans doute opposé à la morale civile et aux usages de l’église; mais les pauvres gens qui le plantaient craignaient encore moins de blesser les lois canoniques que d’offenser le sens commun.
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