Messieurs, Mesdames,c’est l’usage,
Dit-on, qu’à la première page
De chaque livre son auteur
Adresse un avis au lecteur.
Dans ce discours préliminaire
Il tâche toujours, en bon père.
De peindre avec sincérité
Ce que l’ouvrage a de beauté ;
Il conte qu’à l’œuvre nouvelle
Le succès deviendra fidèle,
Et comment tous les éditeurs
Vont se la disputer… Lecteurs,
Et vous surtout, chères lectrices,
Pour que vous me soyez propices,
J’en pourrais faire autant – Eh bien,
Souffrez que je n’en fasse rien.
Parmi vous bien des gens peut-être
Seront curieux de connaître
Ce qu’on nomme les Petits Rois,
A quel peuple ils donnent des lois,
Sur quel pays, quelle contrée
S’étend leur puissance sacrée,
S’ils ont des soldats bien nombreux,
S’ils rendent leurs sujets heureux…
Vous cherchez ce qu’est leur puissance?
Elle est universelle, immense;
Car en tout temps et tout pays
A ces rois les cœurs sont conquis.
C’est d’eux que leur vient la couronne,
C’est en eux qu’ils ont mis leur trône,
Et mon père dit qu’ici-bas
C’est le seul qu’on ne brise pas…
Mais pourquoi perdre en long discours
Un temps si précieux toujours?
Lisez plutôt ce que naguère
A Nadaud écrivait mon père ;
Lisez, ,et bientôt, je le crois,
Vous sourirez aux Petits Rois.
Réponse :
Ils sont charmants ces vers que le cœur vous inspire !
Je ne puis les chanter; mais je pourrai les lire.
Je vois que vous avez au moins un Petit Roi;
Ce qui vous donne encor d’avantage sur moi.
Je n’ai pas entendu ces anges en prière
Implorer le bon dieu pour leur père et leur mère;
Je chante, vieux garçon, les fils de mes voisins,
Comme certain Renard a chanté les raisins.
Gustave Nadaud. 4 Avril 1869. Préface, Henri Jousselin.