Du corbeau, qui estoit assis
Sur une croix, de cinq à six
Toyses de hault ; lequel tenoit
Un formage au bec : là venoit
Un renard qui vit ce formaige :
Pensa à luy : « Comment l’auray-je ? »
Lors se mist dessoubz le corbeau :
« Ha ! fist-il, tant as le corps beau,
Et ton chant plein de mélodie ! »
Le corbeau, par sa conardie,
Oyant son chant ainsi vanter.
Si ouvrit le bec pour chanter,
Et son formaige chet à terre ;
Et maistre renard vous le serre
A bonnes dents, et si remporte.
Ainsi est-il (je m’en fais forte)
De ce drap : vous l’avez happé
Par blasonner, et attrapé,
En luy usant de beau langaige,
Comme fist renard du formaige :
Vous l’en avez prins par la moe.
(Extrait) – La Fontaine, qui savait par cœur son Pathelin, s’en est souvenu en composant sa fable : le Renard et le Corbeau.
Maistre Pierre Pathelin suivi de Nouveau Pathelin et du Testament de Pathelin : Farces du quinzième siècle… Adolphe Delahays, 1859
Du Corbeau et du Renard par Pierre Blanchet, 1459 – 1519