D’un Gresillon dist la ménière
Qui dusqu’à une fromiéère
El tans d y vers esteit alez,
Par aventure enz est entrez;
La viande demanda et quist,
Car n’en aveit nient ce dist
En sa mesun , n’en snn recet .
Dist la Formiz, k’as-tu dune fet
Kant tu déusses gaaingnier
En mois d’aoust è purchacier.
Je chantai, feit-il, è déduiz
Les autres Bestes , mais ne truiz
K’il me voille guerreduner,
Pur ce m’estuet ehsi aler;
Dist la Fromiz, or chante à mei,
Par cele fei que jeo te dei ;
Melx fust que tu te purchacasses
En mois d’aoust è gaaignasses,
Ke venisses de freit murant
A mun wuis viande querant ,
Pur coi te dunrai-je à mengier
Qant tu ne me pues mais aidier.
Moralité :
Pur ce deffent que nus ne vive
En nun-caloir ne en widive
Selunc ce que chascuns deit faire
Se doit pener de bien atraire.
Plus est chiers cil qi a quoi prendre
Que s’a l’autrui l’estuet atendre.
– Cette fable est aussi intitulée dans le man. M, n° 17, dou Criquet et de la Fromi, et dans le n° 7615, D’un Cucu et d’un Formiz, et dans d’autres de un Crisnon.
La Fontaine. La Cigale et la Fourmi, liv. I, ch. I.
– On voit que , dès le temps de Marie , ou prétendait que la nature avait accordé à la fourmi une sorte de prudence ou plutôt d’instinct, qui consistait à faire des provisions pour se nourrir pendant l’hiver. Cette opinion , suivie par la Fontaine et généralement reçue, est démentie par les observations modernes. (D’un Gresillon e d’un Fromi)