Fables de l’Académie des jeux floraux
M. Florentin Ducos (1789-1873), un des quarante Mainteneurs,
Lue dans la séance particulière du 25 Mai 1838.
“Pourquoi fuir les rayons du jour,
Disait un Ver à la Chenille?
Vois la beauté dont le ciel brille.
Le doux printemps est de retour;
Dans les champs tout parle d’amour,
Pour t’enfermer dans la retraite,
Quel moment irais-tu choisir ?
Cette heureuse saison n’est faite
Que pour la joie et le plaisir.
D’une trop pénible industrie
Laisse les travaux rigoureux;
L’herbe est si haute , si fleurie ;
Viens t’associer à nos jeux. »
Mais la Chrysalide plus sage
Lui répondait: ” De ton conseil,
Ami, je ne puis faire usage;
Ce beau ciel, ce brillant soleil,
Ces champs, ces fleurs, celle verdure,
Je les admire comme toi.
Mais écoute : il est une loi
Que je subis, quoique un peu dure;
Loi de contrainte, mais d’espoir;
C’est celle qui fait un devoir
Du travail à la créature.
De la prison que je bâtis
Pour moi ne t’inquiète guère
Ma captivité volontaire
Attend un magnifique prix.
Mes chaînes , loin d’être d’être éternelles,
Vont bientôt se décomposer ;
Un jour suffit pour les briser;
En les quittant, j’aurai des ailes. »
Heureux celui dont les plaisirs,
N’ont point consumé la jeunesse ;
Dont le travail et la sagesse
Occupèrent tous les loisirs!
Dune silencieuse étude
Les fruits mûrissent, quoique lents :
Le travail et la solitude
Donnent les ailes aux talents
“La Chrysalide”
Recueil de l’Académie des Jeux Floraux – 1839