Une fort belle Montre à répétition ,
Du hasard se croyait l’ouvrage ,
Et refusait de rendre hommage
A l’Horloger auteur de sa construction.
« Votre refus , dit-il, ma chère,
» Prouve ici votre aveuglement :
» Vous en reviendrez, je l’espère ;
» Causons tous les deux un moment.
» De vos ressorts le superbe assemblage,
» En temps égaux , vous fait diviser chaque jour :
» Mais, seule, en marquez-vous constamment le retour ;
» Vous n’avez pas cet avantage,
» Non. Cette main que vous méconnaissez,
» A formé vos ressorts, elle rend à votre être
» Le mouvement quand vous cessez;
» Eh !pouvez-vous ne la pas reconnaître?
» De tous vos attributs je suis le créateur,
» Et le maître à l’instant exerçant ma puissance,
» De vous punir de votre extravagance,
» En détruisant le principe moteur.
» Il dit : pour son plaisir la Montre est retardée,
Il l’arrête à son gré. — Maintenant j’en conviens,
Je vous dois tout, dit-elle, et suis dissuadée ;
Chaque effet à sa cause, allez, je le vois bien :
Le hasard est un mot, et le hasard n’est rien. —
Envers la Majesté suprême,
Mortels ingrats, vous comportez-vous mieux ?
Tout vous surprend, tout éblouit vos yeux,
Et cependant vous agissez de même.
“La Montre et l’Horloger”