La Mouche et la Fourmi commentaires et analyses de MNS Guillon – 1803.

(5) Pendant que celle-ci. Elle ne daigne seulement pas rappeler par son nom, ni fixer les yeux sur elle. (La Mouche et la Fourmi)
(6) Vit trois jours d’un fétu qu’elle a traîné chez soi. Pas un. mot oiseux. Fit d’un fétu. Quelle proportion d’un fétu à un bœuf! Trois jours. Il faut être bien misérable pour se condamner à tant d’économie. Qu’elle a traîné. Traîner ne convient qu’à une mercenaire gagnant sa vie à la sueur de son front. Chez soi. Et quel chez soi? des greniers ! Le chez soi de la Mouche, ce sont les palais, c’est la table même de Jupiter.
(7) Mais, ma mignone. C’est le ton insultant de la protection. (8) Avez-vous dit ? Cette réplique de la Fourmi laisse voir toute
la patience qu’elle a à écouter. Sa réponse est un petit chef-d’œuvre de précision, de dialectique et de véritable éloquence.
(9) Et quant à goûter la première, etc. Croyez-yous qu’il en vaille mieux, etc. Ces vers laissent quelque
chose à désirer du côté de la correction. Quant à ne se joint qu’à un substantif. Il en vaille est suranné. Dans le vers d’après, aussi font, il faudroit ainsi. Mais y a-t-il des fautes au milieu de tant de détails enchanteurs ?
(10) Sur la tête des Rois et sur celle des Ane. Seroit-ce la rime qui auroit commandé ce rapprochement ignoble et injurieux
même dans les préférences qu’il établit? Quand Horace a dit:
Pallida mors aequo puisât pede
Regemque turres pauperumque tabernas; Ce sont les extrêmes qu’il met en opposition ; et c’étoit là le modèle que le poète auroit pu suivre.
(11) Vous fassiez sonner vos mérites. Mérite ne s’emploie plus au pluriel qu’en style de dévotion ; les mérites de la Sainte Vierge; c’est une perte pour la langue. Voyez comme ici vos mérites relève le sarcasme du reproche.
(12) Les Mouches de Cour, Les factieux. Les Mouchards.Espions ; parce que, comme les Mouches, ils vont chercher tout leur pâture. (V. Ménage et Le Duchat, Notes sur Rabelais( T. II. p. 166. éd. d’Amst. 1726.)
Marie a substitué une Abeille à la Fourmi employée par Phèdre et La Fontaine. « S’il est pardonnable, dit-il, à l’Abeille de se donner des louanges, ou ne le pardonnera point à la Fourmi , insecte aussi incommode et tout aussi inutile que la Mouche». (Fabliaux, T. III. p. 338.) Qu’importe, dirons-nous au savant écrivain ; qu’importe ce genre de mérite au fabuliste , pourvu que les caractères qu’il prête à ses personnages, soient justifiés par l’opinion ? La supériorité de l’Abeille sur la Mouche est une vérité si triviale, qu’elle ne peut être disputée par aucun insecte ailé ; au lieu que la Fourmi, animal d’une autre espèce , piqué bien davantage la curiosité, et par-là donne bien plus d’intérêt à sa défense.