Emile Deschamps de Saint Amand
La pauvre enfant ! Comme un déluge
Elle a vu le grand fleuve entrer ;
Et sur le toit, dernier refuge,
Elle a fui, voyez-là pleurer.
Jusqu’à ses pieds les vagues roulent,
Les maisons à l’entour s’écroulent.
Allons ! allons ! faisons-nous matelots,
Pour la sauver de la fureur des flots.
La pauvre enfant ! Une autre épreuve,
Au fléau se mêle déjà ;
Sa prière a dompté le fleuve,
Mais sa mère, elle n’est plus là !
Nos bras sur la plage voisine,
N’ont-ils sauvé qu’une orpheline ?
Prions ! prions ! que le Dieu des douleurs,
Rende une mère à son enfant en pleurs !
La pauvre enfant ! Voilà sa mère
Qui lui rouvre ses bras chéris ;
Mais les torrents, angoisse amère,
Hors ce bonheur leur ont tout pris !
Et loin, bien loin, de chaume en chaume,
La famine étend son royaume.
Donnons, donnons ; quand nous avons du pain,
Il ne faut pas que nos frères aient faim !
“La Pauvre Enfant ou l’Inondation “
- La Corbeille de l’enfance par M. J.Adolphe Guerard – 1853