Une poule pondait tant que c’était merveille :
C’était la poule sans pareille ;
A payer son tribut elle ne manquait pas,
La dame du logis en faisait un grand cas ;
On le croira sans peine, elle était délicate,
Elle aimait les œufs frais, et n’était pas ingrate.
Qu’on ait soin de ma poule, elle vaut son poids d’or ;
Je l’aime à la folie ; enfin, c’est un trésor.
On en eut si bien soin que bientôt la poulette,
Qui prenait l’orge à gré, devint si rondelette
Qu’elle en pondit plus rarement ;
Bientôt la voilà grasse, et d’œufs plus de nouvelle.
La dame s’en plaignit d’abord fort doucement,
Puis jeta les hauts cris, puis s’y prit autrement :
Vous ne pondez donc plus, ô gentille femelle ?
Vraiment, j’en suis d’avis, on nourrira la belle
Pour avoir le plaisir de l’entendre chanter ;
A moins que ce ne soit pour la voir coqueter…
Qu’on lui prenne la gorge, et tôt qu’on la lui coupe,
Car je prétends qu’elle est fort bonne à mettre au pôt.
Aussitôt fait que dit, et l’on n’en dit plus mot…
On fit l’éloge de la soupe.
“La Poule bien-aimée”