Études sur L’Ane portant des reliques, P. Louis Solvet – 1812.
- L’Ane portant des Reliques.
Ésope , F. 261.
Une aventure arrivée à Piron offre un trait qui devient ici très-piquant, à cause du rapport qu’il présente avec cette Fable, pourvu, cependant , qu’on éloigne toute idée de comparaison entre ce poète célèbre et le ridicule personnage qui en est le héros. Piron était depuis peu à Paris, lorsque revenant un jour du bois de Boulogne, il s’assied sur un banc à la barrière de la Conférence. Aussitôt il se voit salué par tous les passants qui entraient et sortaient, à pied, à cheval ou en voiture, et 3e poète d’ôter son chapeau plus ou moins bas, suivant la qualité des personnes. «Oh! oh! disait-il en lui-« même, je suis beaucoup plus connu que je pensais. » A la fin, l’exercice du chapeau devenant très-fatigant, il l’ôta tout-à-fait, se contentant de s’incliner devant ceux qui le saluaient. Une vieille femme survient, qui se jette à ses genoux , les mains jointes ; il veut la faire relever : elle ne l’écoute point. Il se baisse, prête l’oreille: il entend qu’elle marmotte quelque chose entre ses dents. C’était un Ave qu’elle adressait à une image de la Vierge, placée précisément au-dessus du banc où il était assis. (Vie de Piron, par Rigolet de Juvigny.)
V. 11. D’un magistrat ignorant C’est la robe qu’on salue.
Ces deux derniers vers sont devenus proverbe. (Ch.)
« Je ne puis apprendre aux grands à distinguer les bonnetades qui les regardent de celles qui regardent leur commission, ou leur suite, ou leur mule. » (Montaigne.)
Le P. Desbillons a rajeuni cette Fable ancienne par un tour nouveau. En voici une imitation française, qu’on relira sans doute avec plaisir :
Le bonheur des Sols.
De la ville un baudet retournoit au village;
D’engrais et de fumier son panier étoit plein ;
Chacun pour l’éviter s’écartoit du passage :
Oh? oh! dit-il, voyez comme on me craint!
Du village à la ville apportant beurre et crème,
Et maints vases de fleurs aux parfums ravissants,
En foule autour de lui se pressoient les passants :
Voyez, dit-il, comme l’on m’aime!
(M. Grenus, Fab. div., livre 4, fable 19)