Un Arpenteur, grand ami de la treille,
Après avoir vidé mainte bouteille,
Pour mesurer un champ, met sa perche à la main ;
Son corps chancelle, et son bras incertain,
La porte à gauche, à droite , et c’est en vain qu’il cherche
À s’en servir utilement.
Dans son courroux, s’en prenant à la Perche :
— « Va-t-en au diable, ô maudit instrument,
C’est toi, dit-il, c’est toi qui nuis à mon ouvrage. »
Et loin de lui la jetant avec rage :
« Sors de devant mes yeux, je ne veux plus de toi. »
Lors, d’une voix et sage et mesurée,
La Perche lui répond : « Pourquoi t’en prendre à moi ?
Je ne puis te tromper ; ma règle est assurée :
Si tu me guides mal, Bacchus dira pourquoi. »
Ainsi, souvent, nous imputons à d’autres
Les fautes qui sont bien les nôtres.
“L’Arpenteur et la Perche”