Nicolas François de Neufchâteau
Dans l’atelier de Phidias
Socrate entre; il voit de la terre,
De l’airain, du bois, et des tas
De marbre, d’ivoire, et de pierre.
« Tous ces objets sont morts »! dit-il au Statuaire —
« Les animer, ce n’est qu’un jeu »,
Dit l’artiste. « A ma voix, ils vivent; je les nomme :
« L’ivoire est une belle, et le bois, un grand homme;
« Le marbre, un roi; le bronze, un Dieu.
« La plus vile matière, a mon art asservie,
« Dans mes mains, à mon gré, prend des traits différents. —
« Phidias, à ton art il n’est rien que j’envie;
« Car sur moi je l’exerce, ou du moins je l’apprends.
« L’homme aussi peut mouler sa vie
« Dans la variété des état» et des rangs.
« Pouvoir, ou dépendance; indigence, ou richesse;
« Patrie, exil; santé, douleur,
« Sont les matériaux que le destin nous laisse.
« Sachons tout employer; et du bloc du malheur
« Nous pourrons tirer la sagesse. »
“L’Atelier du Statuaire”