Par un décret scellé de son anneau royal,
Le roi des dieux promit, pour complaire à Cybèle,
D’octroyer aux tribus du règne végétal
Quelque propriété, quelque vertu nouvelle,
Le tout au gré des requérants.
Pas un, peut-être, ou des bois ou des champs,
Ne resta court à former sa demande.
C’est beaucoup qu’entre tous Jupiter les entende.
Le Chêne demanda de vivre trois cents ans.
Le Houx obtint qu’à ses bras verdoyants
Aucun hiver ne pût enlever leur feuillage.
La Rose qui, dit-on, sans épines naquit,
En fut pourvue alors, dont bien lui prit.
Jupiter s’étonna quand requête pareille
Lui vint de la part du Chardon.
Se prisera-t-il moins que celle fleur vermeille ?
Sans épines peut-il rester à l’abandon ?
D’un vil baudet déjà la dent profane…
« Les motifs n’y font rien, dit le dieu, j’ai promis ;
» Soit fait ainsi qu’il est requis. »
Soudain le Chardon se pavane,
Armé de dards autant et plus qu’un hérisson.
Jupiter n’y plaignit étoffe ni façon.
Mais la plante fut sotte, en sentant que de l’âne
Sous la dent sans arrêt sa feuille fit cric-crac,
Broutée encor sans fin ni pause.
L’extérieur rarement en impose
À qui connoit le fond du sac.
“Le Chardon”