Marie-Nicolas-Silvestre Guillon
Théologien, prêtre – Analyses – Le Coq et le Renard
Le Coq et le Renard, analyse de MNS Guillon – 1803
Le Pogge ajoute à la réponse du Coq ce nouveau dialogue, « Le Coq : Eh ! la paix n’est-elle pas faite entre les animaux ? — Le Renard : Peut-être que les deux Chiens n’en savent pas encore la nouvelle ». Jacques l’Enfant, qui a publié le Poggiana, voudrait que La Fontaine n’eût pas omis cette-répartie du Renard fugitif, comme ayant, dit-il, beaucoup de sel. Cela est vrai ; mais elle étend la morale de la, fable bien au-delà du but du poète, et par-là devient inutile. Ce n’est pas un combat d’esprit qu’il a voulu rendre ; mais une leçon qu’il donne aux trompeurs.
(1) Faites-en les feux. Feux de joie, illuminations. (3) Je m’assure. Il pouvait mettre : j’en suis sûr.
(3) Tire ses grègues , ou ses chausses , faire retraite. Expression tirée du langage burlesque et familier. Régnier avait dit :
Ses grègues aux genoux, au coude son pourpoint.
( Satyre II. vers 45. )
On croit que ce mot vient des chausses à la grecque.
(4) Et notre vieux Coq. Comme il dira plus bas : C’était un vieux routier ; il savait plus d’un tour. (Le Coq et le Renard)
Analyses et commentaires de Pierre Louis Solvet
Il fallait, ce me semble, que le Renard commençât par dire au Coq : « Eh ! mon ami, pourquoi n’étais-tu pas aux fêtes qu’on a données pour la paix qui vient de se conclure ? » Dans ce vers : nous ne sommes plus en querelle, le Renard n’a l’air que de proposer la paix. (Ch.)
V. 17. Que celle
De cette paix.
Ces deux petits vers inégaux ne sont qu’une pure négligence, et ne font nullement beauté. (Ch.)
Cela dépend de la façon de les réciter. Nous avons, au contraire, toujours cru entrevoir dans la coupe des six premiers vers de la réponse du coq, dont ceux—ci font partie, un certain artifice de style qui peignait au naturel la situation du personnage au compliment inattendu de son ennemi. Il commence par se confondre en banales actions de grâces, sur lesquelles il semble fortement appuyer, comme pour se donner le temps de trouver quelque expédient qui le délivre de la présence de l’astucieux messager. Celui des deux lévriers qu’il feint de voir a-t-il frappé son idée, plus de crainte ni d’embarras : le vers et l’expression coulent de source, et la vraisemblance est telle , que le Renard lui-même s’y laisse prendre comme un sot.
V. 20. Ami, je vois deux lévriers
Qui, je m’assure, sont courrier.
Je m’assure, sans régime, ne se dit plus ; mais du temps de La Fontaine , cette locution n’était pas encore bannie de l’usage : on la retrouve même dans Racine. Le Fablier pouvait sans doute plus correctement, en apparence, substituer j’en suis sur ; c’est l’avis d’un de ses commentateurs. Il a préféré, cependant, s’en tenir à la vieille façon de parler ; négligence pour négligence, la moins choquante est celle que son instinct lui a fait choisir : J’en suis sûr sont devenait dur, et sifflant.
V. 29. Mal content de son stratagème.
On dirait aujourd’hui mécontent. (Chamfort) On le disait également du temps de La Fontaine. Il lui aura semblé sans doute que mal content était plus significatif. En effet, il est rare que les mots dont l’usage a adouci la prononciation n’aient pas à cela perdu quelque chose de leur énergie.