Un Geai se couvrit du plumage
D’un Paon qui venoit de muer ;
Et crut qu’en ce bel équipage,
Chacun alloit le saluer.
D’abord, en sa sotte manie,
Des Geais quittant la compagnie,
Parmi les Paons il alla se quarrer ;
Mais on reconnut son allure :
Et dépouillé de sa fausse parure,
Il lui fallut se retirer.
Les Geais instruits de l’aventure,
Pour le punir de son orgueil,
Loin de se venger de l’injure,
Lui firent tous pareil accueil.
On fait une sotte figure
Paré des dépouilles d’autrui.
Le monde n’est plus aujourd’hui
La dupe de cette imposture.
“Le Geai paré des plumes du Paon”
Le Geai paré des plumes du Paon, par La Fontaine
Un Paon muait ; un Geai prit son plumage ;
Puis après se l’accommoda ;
Puis parmi d’autres Paons tout fier se panada,
Croyant être un beau personnage.
Quelqu’un le reconnut : il se vit bafoué,
Berné, sifflé, moqué, joué,
Et par Messieurs les Paons plumé d’étrange sorte ;
Même vers ses pareils s’étant réfugié,
Il fut par eux mis à la porte.
Il est assez de geais à deux pieds comme lui,
Qui se parent souvent des dépouilles d’autrui,
Et que l’on nomme plagiaires.
Je m’en tais ; et ne veux leur causer nul ennui :
Ce ne sont pas là mes affaires.