Joseph Barthélemy de Feraudy
De grâce, permettez que je m’attache à vous,
Disait en s’adressant à certaine muraille,
Un lierre sans soutien, aussi faible que doux.
Privé de tout appui, je ne vaux rien qui vaille ;
Mon amie, à coup sûr votre solidité,
Sans que vous éprouviez le plus léger dommage,
Peut devenir pour moi de quelque utilité.
La muraille accueillit bonnement ce langage,
Mais quelque temps après reconnut son erreur.
L’arbuste se glissait dans son intérieur,
Des pierres détruisait ce qui les joint entre elles,
Et portait au ciment mille atteintes cruelles.
Elle appelle à grands cris le maître à son secours,
Et lui tint, en pleurant, à peu près ce discours :
Viens me débarrasser de cet hôte incommode,
Ce perfide ennemi nuit et jour me corrode.
Le maître l’entendit ; et soudain l’approuvant,
Essaya d’extirper la plante parasite ;
Mais ses tiges avaient pénétré trop avant ;
De la pauvre muraille il craint l’écroulement ;
Et se voyant frustré de toute réussite,
Pour ne pas aggraver un mal si désastreux,
Est forcé de laisser cet hôte dangereux.
De ce simple récit on voit que la morale
Est applicable à vous qui, par trop de bonté,
Formez sans réfléchir telle société
Qui par suite souvent peut vous être fatale.
Joseph Barthélemy de Feraudy