U n loup avait emporté
Un agneau dans son repaire,
Et là, tranquille, en sûreté,
Songeant au bon repas qu’il allait faire,
Il le léchait, l’embrassait,
Le tournait, le caressait
Doucement avec sa patte.
L’agneau poussait toujours des bêlements plaintifs.
« Qu’as-tu, dit le glouton, qu’as-tu donc, bête ingrate?
Tu gémis ? et pour quels motifs ?
Que t’ai-je fait ? veux-tu te taire.
Comment, je veux te lécher,
Te serrer tendrement, rien ne peut te toucher?
Faut-il t’égorger pour te plaire ?…
— Achevez-moi, de grâce, oui, je veux bien mourir
Reprit l’agneau, pourquoi me faites-vous souffrir ?
Je sais bien ce que signifie
Le baiser d’un loup :
C’est mon dernier coup.
Achevez-moi, je vous donne ma vie. »
Beaucoup de gens
Vous accablent de tendresses,
Mais après les caresses
Vous déchirent à belles dents.
“Le Loup et l’Agneau”