Un pauvre dieu de bois, abattu par les vents,
Ou par la foudre, ou par le temps,
Froissé, brisé de la secousse,
Était gisant sur le verger,
Que durant près d’un siècle on le vit protéger.
Son front, caché sous l’herbe, était couvert de mousse.
Cependant un vieillard, qui, dès ses jeunes ans,
Avait vu ce verger, son unique héritage,
Sous le dieu protecteur, refleurir au printemps,
A peine de l’automne a cueilli les présents,
Qu’à l’Idole abattue il en va faire hommage.
Son fils qui l’aperçoit : « Eh ! mon père, aujourd’hui
Qu’importe qu’il vous soit ou contraire ou propice ?
A lui, mon père, un sacrifice !
Que pourrait-il pour vous, s’il ne peut rien pour lui ?
—Mon fils, dit le vieillard, viens imiter ton père…
Il est pour nous ce qu’il était :
Ne songe pas au bien qu’il ne pourra nous faire,
Songe à celui qu’il nous a fait. »
“Le Vieillard et l’Idole”