A un jeune disciple qui savait reconnaître ses fautes et se repentir.
Un fleuriste, enchanté des fleurs de son parterre,
Passait là ses plus doux moments.
Les voir, les arroser et toujours se complaire
A vanter leurs parfums et leur mille ornements,
Et leur forme, et leurs agréments,
C’était presque sa vie entière.
Jalouse de le satisfaire
El de mériter son amour,
Chacune de ces fleurs, sur sa tige légère,
De cent attraits nouveaux se parait chaque jour.
Là, le lis virginal entr’ouvrait son calice,
La rose sans épine étalait son carmin
Sur les frais rameaux du jasmin,
Ou couronnait les fleurons du narcisse ;
Tous les présents dont Flore embellit nos jardins
Couvraient, chargeaient ce sol propice,
Où, près de là, brillaient sur des gradins.
La tulipe élancée et la pensée ouverte
Voulaient surtout obtenir un regard,
Et la violette, à l’écart,
Embarrassée, humble et couverte
D’un buisson qui la dérobait,
Répandait une odeur dont tout l’air s’embaumait.
— Mais toi, pauvre Églantier, parmi ces fleurs écloses,
Pourquoi détourner les rameaux ?
Ils sont verts, ils sont frais, et partant ils sont beaux.
Qu’as-tu ? Qui te retient ? Tu n’oses
Permettre à tes boutons nouveaux
De s’entr’ouvrir en fraîches roses ?
— Hélas ! plus d’une fois j’ai déchiré la main
Qui prodigue ses soins à ce charmant parterre !
Ah ! pourquoi le cruel destin
A-t-il semé des dards sur ma tige légère ?
Car je me trouve heureux d’occuper cette terre,
Et je voudrais découvrir le moyen,
Bon maître, de vous satisfaire.
— Console-toi, car tu peux plaire,
Eglantier ; le parfum divin
Qu’exhalent tes petites roses
Et le bien que tu me proposes
Font oublier, dans ce jardin,
Les faibles chagrins que tu causes.
Bon désir et quelques efforts
Nous excusent de bien des torts.
“L’Églantier”