Fablo.
Dous ratouns boüens amis, esten per orto un jour,
Din soi galaries ourdinaris
Que soun graniés, estagieros, armaris,
Troboun un Flascoulet tapa qu’à souu oudour
Jugeoun plein d’oli fin ; ve lei vaquito en festo.
Si delegoun, fan tour sur tour,
Et de l’abasima d’abor li ven en testo.
Lou plus foüer s’apountélo au soou,
S’esquicho, enpigne, fa esquineto;
L’autre doou tap pren la courdeto,
Fa foüerso, tiro, et ta tout ce que poou
Per l’en pau boulega. Mai noun, li a ren à faire;
Tous seis efforts, pecaire,
Amoussarien pas un calen.
Las, fatigas, prenoun alen.
Quand l’un deis boustigouns dis à l’autre ; coumpaire,
Fasen pas refleccien que ce que fen, voou ren.
Mi ven uno milloue pensado ;
Qu’ès de rata lou tap, ensuito de saussa
Noüestrei coües din lou Flascou, et puis de lei sussa.
Tant fa, tant ba. La cauvo es aprouvado.
Lou tap es assiegea, mountoun à l’escalado;
Roüigoun tant, qu’a la fin lou Flascou es destapa.
Fan navega lei coue, vague de lei lipa
Tiro, lipo, lipo, bouto.
N’en laisseroun pas uno gouto.
Engïen voou mai que fouerço en qu’soou s’entraina. »
Traduction
Fable. — Les Souris et le Flacon
Deux souriceaux, bons amis, étant en promenade un jour,
Dans leurs galeries ordinaires,
Qui sont greniers, étagères, armoires,
Trouvent un petit Flacon bouché qu’à son odeur
Ils jugent plein d’huile fine; voyez ! les voilà en fête;
Ils se délectent, font tour sur tour,
Et de le briser d’abord leur vient en tête.
Le plus fort s’accote au sol,
Fait des efforts, pousse, courbe l’échine ;
L’autre du bouchon prend la cordelette ;
Fait force, tire et fait tout ce qu’il peut,
Pour le bouger un peu.
Mais non, il n’y a rien à faire;
Tous ses efforts, le pauvret !
N’éteindraient pas une lampe.
Las, fatigués, ils prennent haleine.
Quand l’un des lurons dit à l’autre; compère,
Nous ne faisons pas réflexion que ce que nous faisons ne vaut rien.
Il me vient une meilleure pensée ;
C’est de ronger le bouchon, ensuite de saucer
Notre queue dans le Flacon, et puis de la sucer,
Ainsi de suite. La chose est approuvée.
Le bouchon est assiégé, ils montent à l’escalade,
Rongent tant, qu’à la fin le Flacon est débouché.
Ils font naviguer les queues, jouent des lippes,
Tirent, lèchent, lèchent, remettent.
N’en laissèrent pas une goutte.
Industrie vaut mieux que force, à qui sait s’y prendre.
Gros ; fabuliste provençal