Deux Coqs, jeunes, bouillants et remplis de courage,
Pour une Hélène combattaient.
C’était pitié de voir ces rivaux pleins de rage,
Qui s’égorgeaient l’un l’autre et de sang dégouttaient.
On les voyait, dardant le feu de leurs prunelles,
Se chercher, se heurter ; et gonflés de courroux,
Se faire avec leurs becs cent blessures cruelles.
Amour, ce sont là de tes coups !
Un Dindon regardait, animal débonnaire,
Et plein de l’amour du prochain,
Leur criait : « C’est péché de battre ainsi son frère ;
De grâce, calmez-vous. » Les Coqs allaient leur train.
L’officieux Dindon se met pour lors en tête
De séparer les combattants.
Mais des coups craignant la tempête,
Il va le front baissé, fait trois pas, puis s’arrête ;
Marche de côté, prend son temps,
Et lance aux héros un coup d’aile
Qui les abat tous deux. Laissant là la querelle,
Le couple furieux, pour cette fois d’accord,
Pousse au Dindon, l’atteint, le renverse, le foule,
Et le laisse là presque mort.
Les Coqs, ainsi vengés, retournent à la poule.
Le Dindon se disait : certes, les gens sont fous
D’aller s’embarrasser des querelles des autres ;
N’avons-nous pas assez des nôtres ?
Je veux calmer ces Coqs, et je meurs sous leurs coups.
“Les deux Coqs et le Dindon”