Deux Écureuils jouaient entre eux.
Un Lapin regardait. Armés d’une raquette,
Vis-à-vis l’un de l’autre ils se placent tous deux.
L’aîné prend un volant, à son cadet le jette ;
Celui-ci le renvoie, et le volant poussé
D’une main habile et légère,
Allait, venait, toujours chassé,
Mais ne tombait jamais à terre.
Les deux pattes en l’air, notre petit Lapin
Riait, sautait, pleurait de joie.
Enfin, n’y tenant plus, il dit à l’un : Cousin,
Souffrez aussi que je l’envoie.
— Très-volontiers, cousin ; et le drôle à l’instant
Se trousse de son mieux, et gravement se place.
Une jambe en arrière, immobile, il attend
Qu’à sa main le globe ailé passe.
Il s’apprête, il le suit de l’œil ;
Et lançant et raquette et volant tout ensemble,
Casse le nez à l’Écureuil.
Le sang coule, le Lapin tremble.
Faisons grâce, dit l’autre, à notre ami Jeannot.
Il ne l’a pas fait par malice.
Son naturel est bon, mais sa patte est novice,
Et c’est, je crois, son seul défaut.
— Soit. Mais je ne veux pas que Jeannot recommence.
Son jeu nous deviendrait fatal.
Mon frère, souviens-toi qu’un sot, par ignorance,
Peut très-innocemment nous faire un très-grand mal.
“Les deux Écureuils et le Lapin”