Un marmot, je ne sais comment,
Se trouva maître un jour d’une poupée.
Vous imaginez aisément
Le bonheur de cette journée.
D’abord , dans tout l’appartement.
La belle dame est promenée;
Ensuite , à côté de l’enfant,
Le soir , à table, elle est placée ;
Et puis il faut absolument
Dans son lit qu’elle soit couchée.
La nuit, dans un rêve charmant,
Il lu revit plus belle et plus parée;
Elle eut, à son réveil, sa première pensée,
Et le matin encor tout son attachement.
Mais, à l’aspect d’un cerf-volant,
Le même jour elle fut oubliée.
Le vent , ce jour-là , soufflait fort ;
La promenade en l’air fut belle,
Et le bambin , qui tenait la ficelle,
Contre celui d’un roi n’eût pas troque son sort.
Le lendemain , pas une haleine de vent ;
Ah ! ce fut une grande peine pour l’enfant.
Mais voilà que l’on apporte,
De la part du bon papa,
Ce char avec son escorte,
Chevaux , fouet, et cœtera.
Tôt ! Mimi se met en voyage,
Et, s’attelant à tout cela,
Criant, fouettant, fait tel tapage
Que l’on eût dit un grand chœur d’opéra.
Le jour suivant c’est pis encore :
Un tambour remplace le char ;
Le jour d’après il est mis à l’écart ;
C’est un hanneton qu’on adore ;
Enfin , le goût du changement
Ne fait que s’accroître avec l’âge.
Voulez-vous savoir à présent
Quel est cet enfant si volage?
C’est vous, c’est moi, c’est tout homme peu sage,
Car sur ce point l’homme est toujours enfant.
“Les Joujoux”