Mortellement atteint d’une flèche empennée,
Un Oiseau déplorait sa triste destinée,
Et disait, en souffrant un surcroît de douleur :
“Faut-il contribuer à son propre malheur !
Cruels humains ! vous tirez de nos ailes
De quoi faire voler ces machines mortelles.
Mais ne vous moquez point, engeance sans pitié :
Souvent il vous arrive un sort comme le nôtre.
Des enfants de Japet toujours une moitié
Fournira des armes à l’autre. ”

Analyses de Chamfort – 1796.
V. 1. Flèche empennée. Le mot empennée n’est point resté dans la langue ;
c’est que nous avons celui d’emplumée, que l’auteur aurait aussi bien fait d’employer.
V. 9. Des enfant de Japet, etc. La Fontaine se contente d’indiquer d’un seul mot le point d’où sont partis tous les maux de l’humanité.
Commentaires de MNS Guillon – 1803.
(3) Des enfans de Japet. Audax lapeti genus, a dit Horace : enclins aux forfaits comme ce Prométhée , fils de Japet, coupable pour avoir dérobé le feu du ciel, dont il anima l’homme. Le seul mot du poète fait toute l’histoire de la race humaine.
(4) Toujours une moitié
Fournira des armes à l’autre. L’image est juste, elle est fondée sur une expérience de tous les momens ; mais l’application n’en est peut-être pas assez exacte , parce que ces armes ne viennent point de notre substance, comme les plumes de l’Oiseau.
Cet apologue fut mis en jeu par Julien l’Apostat, lorsqu’il voulut rendre raison de l’édit par lequel il défendoit aux chrétiens la lecture des livres grecs, et l’exercice des belles-lettres (Camer. pag. 144). – L’Oiseau blessé d’une flèche –