FLORIAN, 1755-1794
Page chez le duc de Penthièvre, officier de dragons, littérateur de salons, Florian n’a jamais composé que des œuvres aimables. Sa Galatée et son Estelle sont des pastorales où ne manque ni la grâce ni l’esprit. Ses arlequinades ont de la malice et de la gaîté. Ingénieux et sensible dans sa prose, il réussit à tourner de jolis vers, et ses fables méritent l’attention, ne fût-ce que pour nous faire mieux sentir le prix de la Fontaine. Elles sont adroitement composées ; on n’y sent pas comme chez Lamotte l’arrangement artificiel : il a de l’invention, les images lui arrivent sans effort. Sa morale est douce et humaine. Il sait conter et animer un récit par des traits agréables. On y voudrait plus de naïveté, une touche plus forte, quelques-unes de ces expressions créées qui portent un écrivain à la postérité. Mais sa gentillesse et sa finesse lui assurent le second rang dans un genre où un maître a tellement excellé qu’il rend toute concurrence impossible (1).
1 – M. Saint-Marc Girardin a dit:
« Les fables de Florian ne sont pas naïves a la façon des fables de la Fontaine, et nous ne sommes pas tentés de nous intéresser aux animaux du poète on an poète lui-même, comme cela nous arrive avec la Fontaine. Le grand fabuliste du dix-septième siècle nous fait aimer ses bêtes, tant il semble les aimer et les prendre au sérieux, ou il se fait aimer lui-même, quand il se prend à nous entretenir de ses goûts et de ses sentiments. Avec Florian, nous ne nous intéressons qu’au sens de’ la fable, à sa moralité, qui est toujours fine et délicate, et à la manière ingénieuse ou même épigrammatique, dont cette moralité est amenée par le récit,
« Florian n’est pas un satirique mordant ou un moraliste profond : il est trop homme du monde pour être un vrai satirique, et son esprit délicat et fin n’atteint pas à la grande morale. Mais il observe bien les petits travers de l’humanité et les défauts particuliers de son temps. Il écrivait dans les dernières années de l’ancienne monarchie, de 1715 à 1189, dans ces années encore belles et douces qui n’étaient pas sans gloire, grâce à la guerre d’Amériques et qui étaient pleines d’illusions généreuses, grâce aux vertus de Louis XVI. Les vertus de Louis XVI promettaient en effet à la France un règne heureux et doux, pourvu qu’elle voulût s’y prêter et qu’elle sût supporter son bonheur. »
“Biographie de Jean-Pierre Claris de Florian”
Extraits des classiques français : dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles: 2: Poésie – Librairie classique de Ch. Fouraut et fils, 1871
- Notice sur la vie de Florian, 1755-1794