Si de nos jours la vérité
A nos cœurs toujours chère,
Se montrait dans sa nudité
Pour instruire la terre,
Tout homme en serait révolté ;
Mais on la chérit dans la fable :
Et sous ce voile intéressant,
Elle amuse l’enfant,
Corrige l’homme raisonnable ;
Par ses récits ingénieux ,
Elle pénètre jusqu’au trône :
Apprend aux rois qu’elle peut rendre heureux,
Tous les devoirs sacrés qu’impose la couronne.
Pour le sage littérateur
La fable est un terrain d’une immense étendue.
Le bon Jean fut grand laboureur;
Il a dans ce terrain fait passer sa charrue :
Il a forcé le sol à rapporter des fruits,
Dont la raison se plaît à faire usage ,
Et que le teins rend,plus exquis ;
Dans ce terrain mettons-nous à l’ouvrage,
Labourons : il n’a pas tout pris.
“Prologue, Le Marchant de Vieville”