Charles-Guillaume Sourdille de la Valette
Écrivain, poète et fabuliste XVIIIº – Un coq prudent
Pendant que nos soldats foudroyaient Constantine,
Un juif fut pris (loin de nous et des siens
Il s’enfuyait : « Halte-là ! je te tiens,
« Lui dit un grenadier. Tu ne m’as pas la mine
« D’un ennemi ; pourquoi fuir ? notre roi
» N’est point en guerre avec la synagogue,
« Et tu pouvais rester chez toi. »
Le juif, remis de son effroi,
Répondit par cet apologue:
Certain coq aperçut un jour,
A l’écart, au fond de la cour
Où tranquille il vivait en sage,
Deux hommes qui, le sabre au poing ,
S’attaquaient, se pressaient, l’œil enflammé de rage :
« Fuyons, dit il ; je sais que l’on ne m’en veut point ;
« Mais l’un ou l’autre camarade
« Va recevoir un coup ou de taille ou d’estoc ;
« Puis on prendra le pauvre coq
« Pour faire un bouillon au malade. »
Charles-Guillaume Sourdille de la Valette, Un coq prudent