Une Brebis , un Coq, item un gros Cochon,
Vivant de pair et compagnon,
Passoient les nuits dans une même étable;
Union que je crois sortable.
Un matin , Dom Pourceau s’écria : quel plaisir
De s’étendre à son aise et ronfler à loisir !
Le sommeil ! … est – il rien qui soit plus salutaire
Crois moi, Brebis, dormons et vogue la galère.
Le Coq lui répliqua soudain:
Le sommeil fait plus de mal que de bien ;
N’en crois pas ses panégyristes,
Innocente Brebis, car ce sont des trompeurs :
Il épaissit le sang , augmente les humeurs,
Et nous rend lourds et tristes.
Qui veut vivre gaillard et sain,
Doit se lever de grand matin.
La Brebis ne sachant que croire,
Se rompt la tète à deviner
Qui mieux avoit su raisonner;
Comme s’il n’étoit pas notoire
Que messieurs les donneurs d’avis
De vive voix, ou dans un livre ,
Nous exhortent toujours à suivre
Les mêmes pas qu’ils ont suivis.
“La Brebis , le Coq et le Cochon”
- Jean-Espérance-Blandine de Laurencin – 1733 – 1812