Un cheval vit un jour sur un chemin de fer
Une machine énorme, à la gueule enflammée,
Aux mobiles ressorts, aux longs flots de fumée.
En vain, s’écria-t-il, ô fille de l’enfer!
En vain tu voudrais nuire à notre renommée.
Une palme immortelle est promise à nos fronts,
Et toi, sous le hangar honteuse et délaissée,
Tu pleureras ta gloire en naissant éclipsée.
De vitesse avec moi veux-tu lutter? — Luttons!
Dit la machine; enfin ta vanité me lasse,
Elle roule, elle roule, et dévore l’espace ;
Il galope, il galope, et d’un sabot léger
Il soulève le sable et vole dans la plaine.
Mais il se berce, hélas! d’un espoir mensonger!
Inondé de sueur, épuisé, hors d’haleine,
Bientôt l’imprudent tombe et termine ses jours;
Et que fait sa rivale , elle roule toujours.
La routine au progrès veut disputer l’empire ;
Le progrès toujours marche, et la routine expire.
“La Locomotive et le Cheval”
- Pierre Lachambeaudie – 1806 – 1872