« Tais-toi, maudit criard, disait un Âne, un jour,
A certain Coq dont la voix matinale,
De la riante aurore annonçant le retour,
Sans pitié réveillait les échos d’alentour.
» Tais-toi, ta voix est un scandale
« Qui devrait t’attirer les plus durs châtimens :
» Eh quoi ! de ta voix glapissante
« Entendre chaque jour les horribles accens !
« Chaque jour fatiguer par tes cris insolens
» La basse-cour retentissante ,
« Et troubler le repos des plus honnêtes gens
« Eh quoi ! lorsque, dans son étable,
» Le porc voudrait goûter un sommeil agréable,
» Quand le bœuf voudrait ruminer,
« Moi-même enfin, me laissant entraîner
» Aux charmantes douceurs d’un repos délectable,
« Quand je voudrais jouir de ne penser à rien,
– Maudit Coq, par tes cris…. » — « Tais-toi, méchant vaurien,
» Répond le Coq, tout bouffi de colère :
» Quand du travail ici je donne le signal,
» Ce n’est qu’à toi qu’il peut déplaire,
» Ce n’est qu’aux paresseux qu’il peut être fatal ;
» J’éveille contre eux seuls l’active vigilance.
» Ah ! que ne puis-je, par mes chants,
» Bravant de tes pareils la brutale insolence,
» L’éveiller contre les méchans ! »
“L’Âne et le Coq”