Un autour et un hibou s’étoient liés d’une étroite amitié. Au printemps l’autour ayant fait un nid au haut d’un chêne, l’autre vint y pondre. Alors le noble oiseau renonçant généreusement, en faveur de son ami, à la douceur de devenir père, adopte les œufs et les couve comme s’ils étoient les siens. Dès que les petits sont éclos, il les appâte avec la même tendresse; mais il est étonné de voir sans cesse son nid humide et infecté par leur ordure, et il leur en fait des reproches. « Voilà vingt ans de suite que j’ai une aire, leur dit-il, et jamais je n’ai éprouvé d’au-cun de mes enfants dégoût semblable. » Les jeunes hiboux répondirent que ce n’étoit pas leur faute, et ils ajoutèrent naïvement que leurs parents les ayant faits foireux, il ne dépendoit point d’eux d’avoir un nid qui fut propre. « Vous avez raison, reprit l’autour, j’ai pu vous faire éclore, je puis encore vous élever et vous nourrir, mais tous mes succès se borneront là; jamais on ne change un mauvais naturel. “
“L’Autour et le Hibou”