Un Dindon, bouffi d’arrogance,
Au vol défia le Corbeau ;
Tout lecteur jugera d’avance
Qui dut emporter le gâteau.
Mais au milieu de la carrière,
Voyant le Corbeau près du but,
Le Dindon, à son adversaire,
Cria : le vilain , comme il put !
Je suis bien bon d’entrer en lice,
Avec le dernier des oiseaux !
Son chant seul porte préjudice,
Et son bec fouille les tombeaux !
Il lui répondît : je méprise
Tes injures hors de propos ;
T’avoir vaincu , m’en indemnise :
Lequel des deux est plus dispos ?
C’étoit le cas; mais dans sa rage,
Souvent un injuste censeur
Ne pouvant attaquer l’ouvrage,
Se déchaîne contre l’auteur.
“Le Dindon et le Corbeau”
- Jean-Espérance-Blandine de Laurencin – 1733 – 1812