Pierre Louis Solvet
Homme de lettres, écrivain et analyses des fables – Le Lièvre et les Grenouilles
Études sur Le Lièvre et les Grenouilles, P. Louis Solvet – 1812
XIV. Le Lièvre et les Grenouilles.
Ésope, F.57.
V. 1. Un lièvre en son gîte songeoit ;
(Car que faire en un gîte à mains que l’on ne songe?)

Ce dernier vers est devenu proverbe, à cause de son extrême naturel, sans qu’on puisse voir d’ailleurs ce qui a fait sa fortune. (Ch.)
La Harpe, au contraire, en le citant dans son éloge de La Fontaine, dit à son sujet : « Je crois qu’il est impossible de mêler plus rapidement le récit et la ré-flexion. »
V. 17. Il était douteux, inquiet.
Par douteux, le poète entend : irrésolu, indécis. Ce mot ne se dit ,le plus communément, que des choses, et non des personnes, il paraît, cependant, qu’autrefois sa signification était plus étendue. Régnier, dans sa 5e. satire, peint le vieillard
Imbécile, douteux, qui voudrait et qui n’ose.
Et Boileau lui-même, dans sa 3e. épître adressée au docteur Arnauld, se dit :
Toujours douteux, chancelant et volage.
V. 18. Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre.
Et corde et genibus tremit, comme ce faon de biche qui cherchent sa mère non sine vano aurarum et silvoe metu, et auquel Horace compare, dans une de ses odes, certaine Chloé qui s’enfuyait à son approche. (liv. 1, ode 23.) Il est possible que ce soit ce vers de La Fontaine qui ait donné au P. Barbe l’idée de sa jolie Fable du Lièvre inquiet, dans laquelle il passe en revue, d’une manière si plaisante, tous les sujets de terreur de ce pauvre animal..
V. 23. Il s’en alla passer sur le bord d’un étang.
S’en aller passer, façon de parler du style marotique.
V. 29. Et d’où me vient cette vaillance?
Il se croît déjà brave, et son amour-propre devient son consolateur : voilà, ce me semble ,la pensée dont il faut achever le développement, et c’est ce que l’auteur ne lait pas. Au contraire, le lièvre qui vient de parler de sa vaillance, parle de sa poltronnerie dans les deux derniers vers. On pouvait, pour sauver cette faute et cette contradiction, supposer que le lièvre finît de parler après ce vers :
Je suis donc un foudre de guerre, et que c’est La Fontaine qui dit en son nom les deux vers suivants ; mais cette conjecture n’est pas assez fondée. (Ch.)
V. 32. Il n’est, je le vois bien, si poltron sur la terre,
Qui ne puisse trouver un plus poltron que toi.
Il n’est donc, à ce que je voi , Poltron qui ne rencontre un plus poltron que soi.
(Lenoble, même Fable.)