Près d’un clos entouré d’épineux arbrisseaux,
Un jeune voyageur, passant par aventure,
Vit un poirier dont la verdure
S’effaçait sous les fruits qui chargeaient ses rameaux.
Une poire le tente; il franchit la barrière,
Et déjà de ce fruit savoure la douceur,
Quand un chien se réveille, et ce gardien sévère
S’élance sur le voyageur.
Contre cet ennemi, qui déjà le terrasse,
Le jeune homme est contraint de défendre ses jours.
Il redouble d’efforts, lutte, se débarrasse;
Et sa main, d’une bêche empruntant le secours,
Étend le dogue sur la place.
Aux aboiements du chien, le maître est accouru.
Il voit son cher Azor sur la terre sanglante;
Et, d’un destin pareil menaçant l’inconnu,
Du tube meurtrier il presse la détente.
Le coup part, le plomb siffle à l’oreille tremblante
Du voyageur, qu’il n’a point abattu.
Mais cet infortuné, qu’emporte la colère,
De la bêche à son tour frappe son adversaire;
Et près de son Azor le maître est étendu.
Du criminel bientôt s’empare la justice.
Il pleure vainement son malheur et ses torts.
Malgré ses pleurs et ses remords.
Le jeune voyageur est conduit au supplice.
« Hélas ! s’écriait-il, que mon sort est cruel !
Je lègue à ma famille une affreuse mémoire;
Je meurs comme un vil criminel,
Et ne voulais pourtant dérober qu’une poire. »
“Le Premier Larcin”