Philomèle et Progné, commentaires de MNS Guillon – 1803.
- Philomèle et Progné.

(1) Tout au plus à quelque rustique, La Fontaine a conservé à ce mot rustique l’acception substantive qu’il a dans les anciens auteurs. Il avoit déjà dit: c’est assez, dit le rustique ( Fable du Rat de ville et du Rat des champs ). Laïques et rustiques se confondoient autrefois et supposoient une égale ignorance, dans ces temps où, les ordres de la noblesse et du clergé étoient seuls en possession de la science. On en voit des témoignages fréquents dans Grégoire de Tours (voyez sa Préface), dans les écrivains d’après Lui et dans les poètes jusqu’au, seizième siècle. Alors la servitude, et l’ignorance faisoient l’apanage des vilains ou rustiques , c’est-à-dire, de ceux qui habitoient les campagnes, ou qui en avoient les mœurs.
(2) Le désert est-il fait, etc. Après avoir cité cette délicieuse tirade toute entière , M. Bernardin de Saint-Pierre ajoute : « Je n’entends pas de fois les airs ravissants et mélancoliques d’un Rossignol caché sous une feuillée, et les piou-piou prolongés qui traversent, comme des soupirs, le chant de cet oisean solitaire, que je ne sois tenté de croire que la Nature a révélé son aventure a: sublime La Fontaine, en même temps qu’elle lui inspiroit ces vers. Si ces fables n’étoient pas l’histoire des hommes, elles seroient encore pour moi un supplément à celle des animaux». (Etudes de la Nature, L. 1. vers le milieu.)
(3) Venez faire aux cites éclater leurs merveilles. Aux cités se rapportant à venez, n’est pas exact. On dit : aller à la ville, venir dans les villes ; le lieu est fixe : aller aux champs , parce que l’espace n’est pas déterminé. On lira avec le plus touchant intérêt dans J. B. Rousseau (L. 1. ép. 6. ), une fable de Philomèle , dont le sujet s’éloigne de celui-ci, mais dont les accessoires, les pensées et la morale se rapprochent de notre apologue.
Un autre poète , M. Lebrun, a imité ainsi la fable de La Fontaine :
Sous des berceaux couverts de verdure et de fleurs ,
Philomèle aux regrets toujours abandonnée, Chante, gémit, verse des pleurs.
Progné, sa sœur infortunée, A ses accents plaintifs vient joindre ses douleurs.
De tous leurs entretiens, Echo, témoin fidelle ,
En les répétant se rappelle Le trite souvenir de ses propres malheurs. (Philomèle et Progné)