La vie des ouvrages de Jean de La Fontaine
Histoire chronologique de la vie et des œuvres de La Fontaine:
1654 – 1658 – 1659 – 1660 – 1661 – 1663 – 1664 – 1665 – 1667 – 1669 – 1671 – 1673 – 1674 – 1680 – 1681 – 1682 – 1684 – 1685 – 1686 – 1687 – 1688 – 1689 – 1691 – 1692 – 1693
1660. — Le 26 août 1660, la reine fit son entrée à Paris. Il en fit une relation en vers, et la donna à M. Fouquet pour le payement d’un des termes de sa pension. Les descriptions en sont charmantes, et montrent un homme qui voyoit bien ce qu’il voyoit, et qui savoit bien dire ce qu’il venoit de voir, quoi que La Bruyère -en ait dit ¹.
Scarron mourut le 14 d’octobre 1660 : il vouloit, avant de mourir, faire une satire contre le hoquet. La Fontaine fit là-dessus cette épigramme² :
Scarron sentant approcher son trépas,
Dit à la Parque : ” Attendez! je n’ai pas
Encore fait de tout point ma satire.
— Ah! dit Cloton, vous la ferez là-bas :
Marchons, marchons, il n’est pas temps de rire. “
Il fit aussi en ce temps-là, l’Épitaphe d’un paresseux, qui est la sienne propre³ ; celle d’un grand parleur; deux épigrammes tirées d’Athénée ; un rondeau redoublé : Qu’un vain scrupule à ma flamme s’oppose, et nous finirons par là l’année 1660.
Il écrivit de sa propre main, au bas de la copie que nous avons sous les yeux : ” Je ne fais pas difficulté d’ajouter à cette lettre, que M. de La Fontaine m’a envoyée, un tableau qu’il fit de la vie d’un de ses proches, au lieu d’épitaphe, le jour de sa mort, et une épigramme de six vers, que j’ai trouvée assez belle et parfaitement bien appliquée au sujet, qui convient à un paresseux. “
Jean s’en alla comme il étoit venu;
Mangea le fonds après le revenu;
Tint le travail chose peu nécessaire.
Quant à son temps, bien le sut dispenser :
Deux parts en fit, dont il souloit passer
L’une à dormir et l’autre à ne rien faire.
On lit dans les imprimés, au deuxième vers : avec le revenu, et au troisième : tint les trésors.
1. « Un homme paroît grossier, lourd, stupide; il ne sait pas parler, ni raconter ce qu’il vient de voir. S’il se met à écrire, c’est le modèle des bons contes; il fait parler les animaux, les arbres, les pierres, tout ce qui ne parle point: ce n’est que légèreté, qu’élégance, que beau naturel, et que délicatesse dans ses ouvrages. » (Chap. xii des Jugements)
2.. Tome VI, p. 281. L’éditeur des Œuvres diverses (1758) dit simplement : Épigramme sur un mot de Scarron qui étoit près de mourir. Il a oublié de dire quel étoit ce mot, ou plutôt ce bon mol, et Marais nous apprend qu’il mouroit avec le regret de n’avoir pas fait une satire contre le hoquet, qui probablement le tourmentoit alors.
3. Pélisson, en envoyant à Fouquet l’épitre qui commence par ce vers :
Je vous l’avoue, et c’est la vérité,
“La Fontaine et Scarron”